Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika a adressé, samedi, un message à l’occasion du double anniversaire de la création de l’UGTA et de la nationalisation des hydrocarbures, dont voici le texte intégral:
Mesdames et Messieurs,
Nous célébrons, en ce même 24 février, l’anniversaire de la création de l’Union Générale des Travailleurs Algériens en 1956 et celui de la nationalisation des hydrocarbures en 1971. Il s’agit là de deux dates d’une grande portée symbolique. Nous les commémorons, chaque année, pour galvaniser notre détermination à relever les défis d’aujourd’hui et à construire l’Algérie de demain. Ces deux accomplissements historiques sont porteurs d’une leçon qui doit guider notre conduite quotidienne, car ils ont été la traduction concrète de la capacité du peuple algérien de se surpasser chaque fois qu’il s’engage pour un but déterminant pour son destin. Le but de leur commémoration est aussi d’inspirer notre jeunesse et de lui insuffler l’ambition de s’investir corps et âme dans l’œuvre d’édification nationale.
En rappelant le combat héroïque des travailleurs pour la libération de la patrie du colonialisme et leur courageuse mobilisation qui a permis de gagner le pari de la nationalisation des hydrocarbures, le 24 Février ont été prolongés par les sacrifices consentis par les travailleuses et les travailleurs algériens durant la décennie noire pour défendre l’outil de production et permettre la survie de notre économie face au déchaînement de la violence terroriste. Ce faisant, ils ont démontré qu’ils sont et demeurent les dignes dépositaires du legs des héros du mouvement ouvrier national, de Aïssat Idir à Abdelhak Benhamouda.
En cette occasion, nous devons rendre hommage aussi bien aux femmes et aux hommes de Novembre, ces travailleurs qui ont permis l’espoir et ouvert des perspectives nouvelles à notre pays, ainsi qu’à celles et ceux qui ont défié la violence terroriste et donné leur vie, pour permettre à notre pays de survivre, de sortir de son épreuve.
Je saisis cette opportunité pour appeler les travailleuses et les travailleurs et particulièrement notre jeunesse à se mobiliser, plus que jamais, pour relancer notre économie, construire l’Algérie forte qui offrira à tous ses enfants les conditions de vie et de travail souhaitables pour tous.
Mesdames et Messieurs,
Nous nous trouvons aujourd’hui face à des challenges déterminants pour l’avenir de notre pays. La crise économique qui a perturbé les fondamentaux économiques mondiaux, par ses conséquences multidimensionnelles, nous interpelle pour bien fixer notre choix des meilleurs voies et moyens de réaliser l’essor de notre économie. Le déséquilibre des marchés pétroliers et ses conséquences sur nos équilibres macro-économiques implique pour nous la nécessité de sortir de la dépendance de notre économie des revenus des hydrocarbures et de nous atteler à diversifier nos sources de revenus en créant de la richesse.
Nous devons nous adapter au changement en hissant notre économie, nos entreprises, nos universités aux standards mondiaux d’excellence et de compétitivité tout en restant fidèles à notre doctrine en matière de politique sociale et de solidarité nationale. Nous en avons les capacités, nous avons le potentiel requis et nous en avons l’ambition.
Notre conviction est que la puissance des Etats repose désormais sur la faculté d’anticipation conjuguée à la compétitivité de leurs économies nationales, elles-mêmes articulées autour de la recherche et développement. Seuls survivent les meilleurs, ceux en mesure d’anticiper le futur, de s’organiser pour le conquérir.
Dans ce monde nouveau, le savoir est à la base de la création de richesses, l’innovation fonde l’avantage concurrentiel des nations et en détermine la puissance.
Notre pays dispose des ressources suffisantes pour opérer une accélération décisive de notre développement et réaliser notre insertion active dans l’économie mondiale.
Mesdames et Messieurs,
Il nous incombe de régénérer la symbolique de Novembre de sorte que le patriotisme s’inscrive, dans l’esprit de notre jeunesse, dans une perspective d’innovation, de créativité, de compétitivité et de quête de l’excellence. Le gouvernement a été instruit pour inscrire la relance de notre économie dans cette perspective et faire en sorte qu’elle fédère les forces vives de notre pays et repose sur l’énergie de notre jeunesse.
Cette jeunesse ne doit plus entrevoir son avenir à travers le prisme des variations des prix du pétrole. Nous devons donc tirer les enseignements qui s’imposent et remettre en cause les distorsions structurelles de notre économie qui ont rendu possible notre exposition excessive à la crise qui a marqué les marchés pétroliers depuis 2014.
Les travailleurs sont sur la ligne de front, car l’industrie est au cœur du processus de relance de notre économie. Plus que jamais, les travailleurs sont la force motrice du développement de notre pays. Plus que jamais, l’entreprenariat est au cœur de la puissance de l’économie et l’entreprise, qu’elle soit publique ou privée, est le levier de l’essor économique. C’est par son pouvoir innovant, sa compétitivité, sa capacité à créer des richesses et des emplois que nous pouvons dépasser efficacement la crise et entrevoir un avenir à la mesure de nos potentiels économiques et humains.
J’ai instruit le gouvernement pour prendre la mesure des enjeux et définir les grands axes d’une action structurante à long terme en vue de moderniser le tissu industriel pour le porter aux standards internationaux de compétitivité et d’excellence technologique. Il lui revient d’agir en profondeur sur la gouvernance économique des structures de l’Etat et des entreprises publiques, de créer les conditions de la cohérence des processus industriels en encourageant les dynamiques d’intégration verticale des chaînes de valeurs, en stimulant l’innovation et en multipliant les synergies.
Le secteur public marchand doit jouer un rôle moteur dans cette dynamique. En même temps, le secteur privé devra être encouragé et bénéficier d’incitations à investir et à innover. La nouvelle loi sur la petite et moyenne entreprise va dans ce sens et met en place les dispositifs nécessaires à l’émergence d’un large tissu d’entreprises compétitives.
La victoire du 24 février 1971 a été et restera une grande date dans le processus du recouvrement de notre souveraineté à travers la nationalisation des hydrocarbures et l’affirmation de la SONATRACH comme porte-drapeau efficace de notre industrie des hydrocarbures.
L’Algérie ne doit plus se suffire d’être un simple exportateur d’hydrocarbures, mais fructifier son génie national afin de s’imposer comme un acteur économique performant et compétitif. Ce faisant, nous réduirons notre vulnérabilité aux cycles imprévisibles des marchés pétroliers et ferons de la richesse, que sont les hydrocarbures, une chance réelle de développement pour notre pays. Je sais que nos travailleuses et travailleurs s’y attellent avec force et détermination ; c’est pourquoi je veux les assurer de tout mon soutien et de toute ma confiance dans l’effort qu’ils sont en train de déployer avec abnégation et un sens patriotique élevé.
L’Algérie est déjà un acteur énergétique important, nous devons en profiter pour développer une économie souveraine et diversifiée. A cet égard, l’industrie pétrochimique, qui est en train de prendre son élan, devra être encouragée davantage pour valoriser nos hydrocarbures.
L’ensoleillement naturel exceptionnel de notre pays autorise, par ailleurs, les plus hautes ambitions dans une transition énergétique volontariste et visionnaire. L’ambitieux projet de réalisation de 22 gigawatts avec, notamment, des centrales solaires devra être, en ce sens, un projet structurant au plus haut point. Il doit reposer sur une composante industrielle à même de mettre pleinement à contribution notre génie national et d’assurer la création de richesses et d’emplois.
Dans de nombreux domaines d’avenir, nous disposons de ressources qui nous qualifient pour accéder au cercle des leaders et devenir un acteur performant dans la transition énergétique. J’accorde une très grande importance à cet objectif et insiste pour que nous adoptions une attitude volontariste et visionnaire, mobilisant toutes nos entreprises et nos universités.
Mesdames et Messieurs,
Notre attachement au développement d’une économie de plus en plus diversifiée nous amène à rappeler l’importance que doit revêtir le secteur de l’agriculture en tant que gisement important d’emplois et source d’amélioration de la sécurité alimentaire du pays.
Les importants atouts de notre pays en matière touristique doivent encourager nos opérateurs à développer davantage ce secteur qui pourra être une source non négligeable de revenus extérieurs.
L’économie des services, qui s’affirment de plus en plus dans notre pays, est un secteur d’avenir dans lequel notre jeunesse aura à relever des défis à la hauteur de ses capacités et à doter ainsi l’ensemble de l’économie nationale des outils de sa modernisation effective.
Mesdames et Messieurs,
Le gouvernement doit veiller à promouvoir la production nationale à travers la mise en place des conditions à même d’améliorer la compétitivité et la qualité des produits nationaux. Nous devons adopter une conduite patriotique économique offensive qui verra l’Etat, loin de s’enfermer dans un protectionnisme stérilisant pour les entreprises nationales, fonder sa politique sur la modernisation du tissu industriel et la saine émulation entre entreprises publiques et privées dans le respect de l’éthique et des intérêts suprêmes de la Nation.
Les nouvelles technologies de l’information doivent requérir toute notre attention du fait de leur transversalité par rapport au système productif et leur fort impact dans la compétitivité des processus industriels. La révolution numérique est un présupposé qui doit constituer la trame de notre ambition industrielle. Beaucoup reste à faire dans ce domaine ; j’appelle tous les acteurs concernés à s’y investir résolument. Ils bénéficieront de tout mon soutien, mais aussi de mon exigeante attention.
La diversification de notre économie devra s’appuyer, de plus en plus, sur des activités plus intenses en technologie et à forte valeur ajoutée, qui devra induire un repeuplement industriel qualitatif et en phase avec les évolutions structurelles de l’industrie mondiale.
Le principe de la préférence nationale prévaudra rigoureusement dans les commandes publiques de même que nous encouragerons les produits nationaux à gagner en compétitivité et occuper une place majeure sur le marché national et à trouver une place dans les marchés internationaux. Le gouvernement accorde la priorité aux activités de valorisation des ressources naturelles pour bénéficier de nos avantages comparatifs.
Le capital humain étant la clé de la réussite et le signe le plus évident de la puissance des Nations, nous veillerons, sans relâche, à ce que notre pays, si riche en intelligence aussi bien présente localement que disséminée à travers le monde, accède à l’excellence de ses universités et à un haut niveau technologique de ses entreprises.
Mesdames et Messieurs,
Les convulsions actuelles des marchés pétroliers, qui frappent tous les pays producteurs, ne pouvaient pas ne pas affecter notre économie. Nous avons œuvré à renforcer la capacité de résilience de notre économie en engageant une politique volontariste de désendettement. Cette politique a porté ses fruits puisque nous sommes en mesure d’affronter cette crise avec sang-froid, avec détermination, tout en étant rassurés quant à nos marges de manœuvres en mesure de nous permettre de mener un plan d’action efficace de sortie de crise.
Dans le même temps, notre pays fait face à l’instabilité récurrente de nos frontières qui nous impose vigilance et attention accrue dans nos approches en même temps qu’elle représente un coût économique dont tout le monde doit être conscient. Ceci nous impose la plus grande rigueur dans l’allocation de nos ressources et nous encourage à aller encore plus loin dans notre politique de réformes.
Cette politique doit identifier les niches d’économie et de rationalisation des dépenses, mettre l’accent sur la compétitivité, les gains de productivité et la rigueur dans la gestion. Il reste fondamental pour nous que cette quête d’une plus grande rigueur dans la gestion ne puisse pas affecter les bas revenus ni sacrifier les principes de justice sociale et de solidarité nationale qui fondent notre action.
Il me faut aussi rappeler que les acquis sociaux, la réduction durable du niveau de chômage ainsi que les nombreuses réalisations socio-économiques n’ont pu être obtenus que grâce au rétablissement de la paix et à la stabilité qui ont prévalu tout au long de ces dernières années.
Le développement, tel que nous le concevons, n’a de sens que s’il vise à améliorer les conditions de vie des citoyens à travers l’ensemble du territoire national, notamment les créateurs de richesse, c’est-à-dire les travailleurs dans toute leur diversité. L’étendue de notre territoire, qui est un avantage certain, nous impose une politique de développement inventive, soucieuse de justice sociale qu’il nous revient aujourd’hui de mener dans une situation exceptionnelle où la diversification de notre économie, dans un contexte de crise, impose rigueur et moralisation de la gouvernance. J’accorde une grande attention à ces questions stratégiques.
La diversification et la compétitivité de l’économie constituent un impératif devenu plus crucial dans le contexte de crise pétrolière que nous traversons. Nous ne pourrons le concrétiser sans la mobilisation résolue de toutes nos forces vives, de l’ensemble des travailleurs et des cadres, des femmes et des hommes qui font la force de notre pays. A ce prix, nous vaincrons les difficultés et poursuivrons notre marche vers le progrès. Je n’ai jamais douté un seul instant de la disponibilité de tous pour relever ce défi. J’encourage, dans ce sens, les travailleurs à veiller à ce que la défense légitime et vigilante de leurs droits aille de pair avec l’observation effective et régulière de leurs devoirs et obligations, dans cette phase si cruciale du développement national.
Mesdames et Messieurs,
La commémoration du 24 Février a été une nouvelle fois une occasion de nous ressourcer dans l’épopée de notre peuple qui lui a permis d’arracher son indépendance et sa liberté et de conforter sa souveraineté économique.
J’ai personnellement saisi cette occasion, aujourd’hui, pour partager avec vous mes convictions et mes ambitions pour le développement économique et social de notre pays, des ambitions qui sont réellement à la portée de l’Algérie, à votre portée, mes chers compatriotes, pour autant que nous nous attelions encore et toujours à l’effort, à la construction et même parfois au sacrifice avec cette détermination reconnue à notre peuple, une détermination qui lui a, à chaque fois, permis de transcender les épreuves, comme ce fut le cas récemment face à la tragédie nationale.
Soyons donc, aujourd’hui encore, à la hauteur des enjeux et des défis. C’est là, sans doute, le meilleur hommage que nous pouvons rendre à ceux qui se sont sacrifiés pour notre indépendance et pour la sauvegarde de notre pays.»