Plusieurs producteurs de dattes algériens se sont lancés, ces dernières années, dans le domaine de la transformation qui offre des opportunités prometteuses aux niveaux local et international, en dépit du cadre législatif inapproprié régissant l’activité.
Cette filière émergente valorise les dattes et crée de la valeur ajoutée en les transformant en plusieurs produits, à l’instar du sucre, l’alcool, le vinaigre, le fourrage, la confiture, les boissons énergisantes, les produits cosmétiques, la levure de pain, etc.
Favorisée par la demande du marché mondiale sur les dattes, cette activité pourrait réduire la facture des importations de plusieurs produits mais également élargir le cercle des travailleurs et intervenants dans la filière, sachant que le nombre des travailleurs dans ce domaine s’élève actuellement à 10 millions, selon des chiffres avancés par des opérateurs dans ce domaine.
Sur la production nationale totale de dattes, estimée à 1 million de quintaux par an, 5% sont exportés et 30% seulement sont utilisés pour produire de produits dérivés des dattes, selon les chiffres fournis par le président du Conseil professionnel des dattes, Kheireddine El Mouaiz.
Dans une déclaration à l’APS, M. El Mouaiz a souligné la nécessité de saisir les opportunités offertes par le développement du marché des dattes dans le monde, expliquant que la demande mondiale sur les dattes et leurs dérivés est désormais trois fois supérieure à la quantité offerte.
Alors que cette filière s’est considérablement développée au niveau mondial, la phoeniciculture n’a pas suivi cette tendance, le nombre de palmiers étant passé de 8 millions en 1990 à 16 millions seulement en 2021.
Dans ce cadre, il a appelé à accorder davantage d’intérêt aux zones de production, telles que les wilayas de Biskra, El-Oued, Ouargla, Ghardaia, Adrar et El-Menia, en vue d’étendre les oasis de palmiers et éviter leur rétrécissement du fait du délaissement de nombreux agriculteurs.
Le développement du marché des dattes dans le monde nécessite des investissements nouveaux et l’accompagnement des opérateurs notamment en ce qui concerne l’acquisition des équipements requis et l’octroi des crédits pour financer les activités de transformation, l’obtention des certificats de conformité nécessaires à l’accès de plusieurs marchés mondiaux, les formations et le soutien de la recherche scientifique en cette matière, a ajouté M. El Mouaiz.
Cependant, poursuit le même responsable, les opérateurs font face à plusieurs obstacles sur le terrain, dont les procédures bancaires pour obtenir des crédits d’investissement dans ce domaine, la lenteur du traitement des dossiers et la non adaptation des textes de loi avec les évolutions actuelles.
Pour sa part, le directeur général d’un des groupes spécialisés dans la transformation des dattes, Abdelmadjid Khobzi a affirmé que l’Algérie qui importe toujours de grandes quantités d’alcool pour la production de gel suite à la propagation du COVID-19 dans le pays, peut exploiter l’éthanol extrait des dattes pour subvenir à ses besoins.
Selon ses déclarations à l’APS, le groupe a pu extraire l’alcool éthylique jusqu’à 70 %, à l’époque où celui-ci est importé avec près de 10 millions de litres/an, contre 5 millions de litres/an avant la crise sanitaire.
La capacité de l’usine pour la production de cet alcool éthylique est de 3.000 litres/jour, dont une quantité est destinée à la production du gel désinfectant.
Bien que les pouvoirs publics ont autorisé à travers la modification de certains textes de loi, la production locale de l’éthanol, le cahier des charges pour cette matière n’est pas encore publié, a-t-il relevé.
Les producteurs attendent depuis plusieurs mois la publication de ce cahier des charges qui devra les aider à contribuer à la réduction de la facture des importations d’alcool, ainsi que “l’amélioration de la qualité des produits désinfectants utilisés, étant donné que cet alcool est d’origine végétale et non pas chimique”, a fait savoir M. Khobzi.
Actuellement, seuls trois pays possèdent la technologie pour extraire l’éthanol des dattes, à savoir la Russie, l’Iran et l’Algérie, a affirmé M. Khobzi, qui a révélé avoir reçu plusieurs correspondances d’universités des Emirats Arabes Unis, du Sultanat d’Oman et d’Arabie saoudite, pour contribuer au développement de la recherche dans cette spécialité.
Quant à la production de sucre extrait des dattes, M. Khobzi a souligné que cette activité avait été temporairement suspendue en raison de l’incapacité de son groupe à importer “la perlite”, utilisée dans le raffinage, après la fermeture des frontières terrestres avec la Tunisie.
Ce Groupe a besoin d’une quantité de 60 tonnes par an qui provient de Tunisie, selon les explications fournies par le directeur général.
La capacité de production du Groupe est de 3 mille tonnes/an de sucre extrait de dattes de “troisième et quatrième choix”, qui est trois fois plus concentré que le sucre ordinaire.
Le prix de vente d’un kilogramme de sucre extrait des dattes est de 350 AD, contre une valeur réelle (hors subventions) pour le sucre blanc à 200 DA.
Pour ce faire, ce Groupe utilise une technologie iranienne, obtenue dans le cadre de la Commission économique algéro-iranienne, avant d’être développée par des ingénieurs algériens des universités de Blida et de Constantine.
Dans une déclaration à l’APS, le directeur général d’une société spécialisée dans les dattes, Mehdi Boukadoura, a indiqué que l’amélioration du cadre législatif est à même de réaliser un saut qualitatif dans la filière des dattes en général, notamment en augmentant la part des dattes transformées et exploitées en la production d’autres produits dans le cadre de la production nationale totale.
Les banques restent l’un des “points négatifs” qui font obstacle à l’émergence réelle de la filière comme l’une des principales sources de devises alternatives aux carburants, ce qui nécessite un travail accru pour faciliter les procédures, en particulier à l’ombre de la pandémie de la Covid-19 qui a ralenti le commerce mondial, a-t-il estimé.
Source APS