Le musée national “Ahmed Zabana” que les Oranais désignaient sous le nom de “Dar Laâdjeb” (maison des merveilles) mérite bien cette dénomination, au vu des richesses qu’il abrite reflétant le patrimoine national dans toutes ses dimensions musulmane, arabe et amazighe.
La directrice de cet établissement culturel, Bouchra Salhi, est convaincue que le musée peut être aisément inscrit dans tout circuit touristique car il permet au visiteur de découvrir des pans entiers de l’histoire, de la culture et des us de cette région à travers les riches collections qu’il recèle.
Le musée “Ahmed Zabana” qui porte le nom du premier chahid guillotiné par la France coloniale, un 19 juin 1956, est un établissement bien particulier. C’est un musée pluridisciplinaire. Il abrite dans ses murs quatre espaces dédiés aux beaux-arts, à l’archéologie, à l’ethnographie maghrébine et étrangère et enfin à l’histoire et à la nature. Autant de vocations qui répondent aux attentes du visiteur le plus curieux et le plus exigeant.
“Ces derniers mois, le musée connaît une hausse significative du nombre de visiteurs étrangers. L’année dernière, ils étaient 595 touristes venant d’Angleterre, d’Espagne, de France, d’Allemagne, de Chine et de Tunisie à avoir arpenter les salles de cet établissement contre 184 l’année d’avant, sans compter les délégations étrangères en visite à Oran”, a indiqué la chargée de la communication et de l’animation de cet établissement, Leïla Boutaleb.
La même année, le musée a accueilli quelque 43.726 visiteurs nationaux soit presque le double de la fréquentation moyenne des années précédentes. “Les élèves des différents établissements scolaires d’Oran et des wilayas limitrophes, des parents accompagnés de leurs enfants, des touristes nationaux constituent l’essentiel de notre public” a-t-elle ajouté.
“Pour le prix d’un ticket d’accès à 200 dinars, le visiteur est convié à un véritable voyage dans les entrailles du musée pour découvrir un patrimoine plusieurs fois millénaire”, souligne Assia, une étudiante du département Histoire à l’université “Ahmed Benbella” d’Oran, qui fréquente le musée dans le cadre de son projet de Master.
Cette jeune chercheuse estime que le musée reste l’endroit le “plus indiqué” pour découvrir l’histoire du pays et son riche patrimoine. “Les étudiants et les associations versées dans la défense et la protection du patrimoine doivent contribuer, à travers leurs pages sur les réseaux sociaux, à la promotion de ces lieux de mémoire”, a-t-elle indiqué.
Hauts lieux de mémoire
La section “Ethnographie maghrébine et étrangère” du musée d’Oran reste la plus attractive pour les visiteurs étrangers qui restent fascinés par le patrimoine algérien et la valeur des pièces exposées, souligne l’attachée de conservation au service d’inventaire du musée.
“Les trésors du patrimoine de notre musée donnent un large aperçu sur la richesse du patrimoine national dans ses trois dimensions amazighe, arabe et musulmane et représentent un pan de la mémoire populaire et collective du pays”, précise Fatima Maghrebi.
Parmi les pièces exposées dans les vitrines du musée remontant au 8ème siècle, le visiteur découvrira des épées, des pistolets, des objets en cuivre à usage multiples, des bijoux kabyles de Béni Yenni, véritables œuvres d’art, finement ciselés par les bijoutiers de Tizi Ouzou.
Cette section conserve d’anciens ustensiles de poterie de la région de Kabylie, de Tlemcen, des meubles soigneusement sculptés berbères, des habits traditionnels, des objets usuels du Grand Sud, exposés à l’intérieur d’une tente, mettant en exergue les coutumes et traditions de la société targuie, des costumes traditionnels oranais dont la fameuse “Blouza Zaïm3.
Cette section présente également des pièces numismatiques remontant à l’ère des royaumes de Numidie frappées par les Aguelid Massinissa, Syphax puis Juba II et autres rois berbères. D’autres pièces frappées de l’époque du fondateur de l’Etat almohade Abdelmoumen Benali El Koumi sont mises en évidence.
Les expositions organisées de temps à autre par le musée national “Ahmed Zabana” ont donné un nouveau souffle à cet établissement, a souligné sa directrice. “Nous veillons, à travers différents canaux de communication moderne à faire connaitre les pièces et les riches collections de notre musée”, a-t-elle expliqué.
Les différentes manifestations tenues au musée, à l’instar de la manifestation “Arssem Madinatek” (dessine ta ville), ainsi que l’exposition sur le patrimoine du M’zab, ont contribué à animer le paysage culturel oranais, sachant que le musée ouvre ses portes pour abriter des expositions, organisées par de jeunes photographes, des artistes en herbe et diverses associations, versées dans le patrimoine algérien, a ajouté Salhi Bouchra.
Nasreddine, un enseignant à la retraite, rencontré sur place, a estimé que les expositions favorisent la prise de conscience du citoyen de l’importance de préserver son patrimoine comme témoin historique. “Les musées trouvent leur raison d’être à travers des activités qui revisitent la mémoire culturelle pour consolider les sentiments de patriotisme et d’appartenance identitaire”, explique ce sexagénaire.
Eu égard à cet engouement particulier constaté pour la branche d’ethnographie maghrébine et étrangère, une réflexion est en cours pour donner un “nouveau look” aux salles de cette spécialité pour attirer davantage de visiteurs, selon la responsable, ajoutant qu’il est prévu la réouverture de l’ancienne salle d’antiquités, fermée depuis plus de dix ans.
Le musée envisage également d’initier un projet de création d’une boutique pour vendre des publications, dépliants et autres documents sur l’histoire de la région, la présentation des collections archéologiques et artistiques. Ce point de vente sera géré par un particulier, conformément à un cahier de charges qui sera avalisé par le ministère de la culture, a-t-on indiqué.
Un gérant d’une agence de voyage et de tourisme ayant pignon sur rue a estimé que le musée d’Oran peut être une “escale importante” d’un circuit à proposer aussi bien aux nationaux qu’aux étrangers. “Les richesses que renferme cet établissement méritent d’être découvertes et connues de tous”, assure-t-il.