L’Ambassadeur d’Algérie au Chili, Mohamed Sofiane Berrah, a déclaré que de nouvelles formes de coopération peuvent émerger entre les deux pays après le gel de la décision du gouvernement chilien de fermer son ambassade à Alger.
Dans une interview au journal chilien “Diario Uchile” à l’occasion du 66 ème anniversaire du déclenchement de la Révolution nationale, l’ambassadeur n’a déclaré que le gel de la décision des autorités chiliennes de fermer l’ambassade du Chili en Algérie, “offre aux deux pays l’occasion d’appréhender le présent et le futur de nos relations bilatérales avec sérénité et optimisme”.
” Dans un contexte mondialisé comme celui dans lequel nous vivons, de nouvelles formes de coopération peuvent émerger pour peu qu’il existe une volonté politique et que soit créés et encouragées des opportunités et des cadres pour nouer des relations d’affaires et favoriser des échanges dans différents domaines”, a souligné Sofiane Berrah.
Car, en définitive, la relation entre deux Etats ne doit pas être jugée à l’aune de l’actualité immédiate et des statistiques commerciales. Elle est faite de valeurs, de combats partagés et d’une vision commune”, a-t-il fait valoir, mettant l’accent sur la nécessité “de projeter dans l’avenir et tracer de nouvelles perspectives”
Du côté algérien, “nous œuvrons à relancer le dialogue politique, à renforcer la coordination et la concertation entre nos deux pays dans les enceintes internationales et à diversifier et à augmenter nos échanges économiques et commerciaux”, a-t-il indiqué.
Dans les domaines scientifique et technique, “nous envisageons avec optimisme la possibilité d’échanger nos expériences, d’approfondir notre coopération et de tirer parti des avantages comparatifs qu’offre chaque pays dans les domaines où il a réalisé des avancées considérables”, a-t-il ajouté.
Similitudes entre l’histoire de l’Algérie et le Chili
Bien que différentes dans plusieurs de leurs aspects essentiels, les trajectoires historiques de l’Algérie et du Chili présentent des caractéristiques communes et certains points de rencontre, de l’avis du diplomate.
L’Algérie et le Chili, tous deux, ont recouvré leur indépendance après une lutte armée contre l’occupation étrangère : espagnole pour le cas du Chili et française s’agissant de l’Algérie.
Deuxièmement, les deux nations ont connu des cycles politiques plus ou moins mouvementés où l’on trouve même une coïncidence de date comme celle du 5 octobre 1988 qui marque, aussi bien en Algérie qu’au Chili, un tournant majeur dans l’avènement du multipartisme et de la transformation du paysage politique.
L’ambassadeur Berrah a ajouté aussi, qu’en 2019, les deux pays avaient connu des mouvements populaires porteurs d’une vision généreuse et d’une grande clarté politique pour le changement.
Pour éviter le dévoiement de ces dynamiques citoyennes et répondre pacifiquement aux attentes populaires, les autorités des deux pays ont fait le choix sage et responsable d’emprunter la voie institutionnelle en posant l’amendement de la constitution – lors du référendum du 25 octobre au Chili et le 1er novembre en Algérie – comme un premier jalon sur la voie de la refonte du système politique et du mode de gouvernance.
Dans cette interview, l’ambassadeur a rappelé que depuis le milieu du siècle dernier, il y a eu des actions de solidarité du Chili avec l’indépendance de l’Algérie.
Il s’agit en fait d’ “un des aspects les plus méconnus de l’histoire de nos deux peuples qui, malheureusement, n’a pas fait l’objet de suffisamment d’attention et d’intérêt des historiens et chercheurs, en Algérie comme au Chili”, a-t-il regretté.
Pour combler cette lacune mémorielle, l’Ambassade d’Algérie a initié il y a quelques mois un travail de recherche visant à remonter aux origines de la solidarité chilienne à l’égard de la lutte du peuple algérien, a-t-il fait savoir.
Les archives consultées montrent que la rencontre entre les militants indépendantistes algériens et les intellectuels chiliens s’est faite dans les cercles de réflexion autour des notions émergentes de “tiers-monde” et de “non-alignement”, au sein desquels la communauté chilienne d’origine arabe a servi de trait d’union pour faire connaître la cause algérienne au Chili et dans les autres pays d’Amérique Latine.
Pour mesurer l’ancrage et l’importance de cette solidarité, il a cité l’exemple du soutien précieux de l’ex. président Salvador Allende, qui avait reçu en 1961 les représentants de la délégation permanente du gouvernement provisoire de la République Algérienne (GPRA) en tournée dans la région dans le cadre d’une mission d’information visant à faire connaître la révolution algérienne.
Cet intérêt pour l’Algérie s’est maintenu et consolidé après son indépendance, conforté par l’établissement des relations diplomatiques et l’ouverture, en 1963, de l’ambassade du Chili en Algérie. “Ceci fait du Chili le premier pays latino-américain à ouvrir une représentation diplomatique dans mon pays”, a-t-il relevé.
Le diplomate n’a pas manqué d’évoquer l’intérêt du célèbre artiste peintre chilien Roberto Matta pour la condition du peuple algérien sous l’occupation française, cause pour laquelle il a consacré deux œuvres majeures à travers lesquelles il a dénoncé la torture, érigée en pratique systématique au cours de la période coloniale.
Côté algérien, on a trouvé la même expression artistique de solidarité du peuple algérien avec les exilés chiliens, dont une bonne partie a vécu en l’Algérie entre 1973 1986, immortalisée dans l’œuvre de Mohamed Khedda intitulé “Banderole pour le Chili”.
Entre 1970 et 1973, ” les relations entre les deux pays ont connu un essor et une densité inhabituelle sous l’impulsion des leaders charismatiques de l’époque, en l’occurrence Houari Boumediene et Salvador Allende”, a rappelé à ce titre, Sofiane Berrah.
Source APS