La Libye fait actuellement face à des crises d’ordre politique, de loyauté et sécuritaire, a indiqué mardi à Alger, l’analyste spécialiste des questions géopolitiques, M’hand Berkouk, appelant l’ONU et l’UA à agir et jouer leur rôle par de nouvelles résolutions.
S’exprimant sur les ondes de la chaine III, de la radio algérienne, au sujet de la crise libyenne, M. Berkouk a expliqué que cette crise “est d’abord d’ordre politique”, notamment en ce qui concerne les divergences entre “les différentes volontés sur la Libye où deux pôles sont en compétition par rapport au type d’Etat dans ce pays”.
Il s’agit aussi, selon M. Berkouk, essentiellement d’une crise de loyauté “non pas envers l’Etat mais envers des alliances notamment avec les pays du Golf”, a-t-il souligné, ajoutant que la Libye fait également face à une crise “d’ordre sécuritaire”.
Dans ce sillage, le spécialiste a déploré une crise de sécurité “chronique à travers la transformation graduelle de la Libye en fief pour ne pas dire en front mondial de terrorisme, avec le recentrage de milliers de combattants terroristes étrangers (CTE) vers ce pays voisin avec notamment les pays du Sahel”.
“La Libye a beaucoup de problèmes en matière de construction d’une identité collective, d’une vision unitaire de l’Etat, et il y a aussi également l’absence d’institutions fédérées de sécurité dans ce pays de sept millions d’habitants”, selon l’analyste.
“Actuellement on voit l’armée nationale libyenne de Haftar mais aussi une armée du gouvernement d’entente nationale (GNA), à Tripoli, en plus de la présence de +milices+ dans ce pays, et les affrontements entre les belligérants en Libye, est un fait quotidien”, a-t-il argumenté.
M.Berkouk redoute d’autre part que le pays “risque de se transformer en incubateur d’une nouvelle forme de terrorisme”.
“On y voit aussi un terrorisme transnational qui risque d’être exploité pour légitimer certaines actions internationales dans ce pays”, a-t-il expliqué.
Toujours sur la situation en Libye, marquée par “la multitude d’ingérences étrangères de forces internationales”, l’analyste a évoqué les enjeux géostratégiques mais aussi économiques notamment énergétiques liés à ce pays (première réserve africaine), alertant sur beaucoup de signes “alarmants” par rapport à l’annonce de déploiement de soldats turcs dans ce pays, en plus de ceux qui existent déjà sur le terrain.
Rappelant les deux mémorandums signés entre Tripoli et Ankara liés à l’énergie et à la coopération militaire et sécuritaires, M. Berkouk a ajouté que la Turquie qui s’implique notamment en Libye occidentale, “exprime une certaine volonté de s’assurer une part du marché énergétique européen”.
“Si Tripoli tombe, cela va être l’embrasement général pour la Libye, selon le spécialiste en géopolitique”, redoutant “un scénario des plus alarmants pour l’Italie dans cette crise qui va longuement durer”.
“La Libye est une porte idoine pour les migrants clandestins qui choisissent l’Italie comme première destination”, a-t-il poursuivi, voyant dans ce cas une vague de réfugiés vers d’autres pays voisins aussi.
En outre, M. Berkouk a mis en exergue l’importance d’une résolution du Conseil de sécurité de l’Onu forçant les deux parties à un cessez-le feu durable avec des sanctions et des décisions contraignantes.
Il a dans ce contexte appelé les Nations Unies à jouer leur rôle par de nouvelles résolutions sous le chapitre 7 portant aussi des sanctions contre les pays qui ne respectent pas le cessez- le-feu.
Pour l’analyste, l’Union Africaine (UA) devrait également jouer son rôle via une nouvelle feuille de route pour la résolution du conflit en Libye, déplorant les précédentes initiatives, les conférences de Paris, Palerme, et d’Abu Dhabi, qui ont toutes échoué.
Pour M. Berkouk, le plus grand paradoxe en ce moment, c’est “cette contradiction entre des discours diplomatiques prometteurs et une réalité très morose, avec une présence multiforme d’acteurs étrangers en Libye…”.
Source APS